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Passage de témoin de TA74 à TA75

Ils sont arrivés les nouveaux.

Cindy, Pierre et Gabriel sont les nouveaux hivernants de la station météo de Dumont d’Urville.

Cindy (la nouvelle responsable) et Gabriel au ballon lors de la passation !

Que c’était émouvant de les voir pour de vrai. J’ai beaucoup pensé à eux en préparant cette passation et maintenant, ils sont là ! Pleins d’enthousiasme et fin prêts !

Comme tous les ans en décembre, le soleil nous défonce les yeux.

Je vous leur souhaite un bon hivernage !

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Manip Empereurs

C’est la dernière activité des hivernants. Celle que tout le monde veut faire. Les hivernants sortants (dont je fais partie) sont ultra-prioritaires. Mais entre les veilles météo, le mauvais temps, et les repos des ornithos… je n’ai pas pu y aller avant l’avant-dernier jour de manip’.

Je suis donc partie le 2 décembre, avec des néophytes : Lise, Narcisse (nouvelle boulangère) et Alex (pilote d’hélicoptère) et des experts : Doumé (spécialiste des transpondeurs), Léo (ornithologue campagnard), Natacha et Amandine (la nouvelle ornithologue hivernante) pour les professionnels. Nous sommes partis avec deux pulkas de matériel (le nécessaire pour les parcs était déjà sur place). Il faisait un temps magnifique.

Manchotière bien étalée

Les poussins des manchots Empereurs sont grands maintenant. Je les ai vu sortir de l’œuf, grandir, se faire attaquer par les skuas et les pétrels géants. Mais ça fait bien deux mois que je ne suis pas allée au Nunatak. La manchotière s’est beaucoup étalée. Les poussins mesurent 80cm et pèsent quelques 15kg. Ils se rassemblent en crèches et sont gardés par les quelques adultes qui restent quand les autres sont déjà repartis en mer pour se nourrir.

Installation du parc

A l’aide de quatre barrières très légères, on parque les poussins sans les adultes. On place une tablette en bois sur le parc pour les opérations de capture. On forme deux chaines de traitement.

Le parc avec la petite tablette.

Un ornithologue entre dans le parc et capture un poussin. Il le place sur la tablette et lui attrape le bec. De l’autre côté de la barrière, nous (les néophytes) passons sur la tête du poussin une chaussette qui lui cache les yeux, mais ne couvre pas le bec. L’ornithologue place le poussin dos à nous. Nous le prenons en mettant les bras sous les ailerons et le soulevons. Quand on a de la chance, il se débat jusqu’à ce qu’il ait les pattes en l’air. Sinon, quand on n’a pas de chance, il se débat tout le temps.

Léo attrape un poussin dans le parc

Comme le bec et les griffes des manchots sont libres de nous blesser, on porte les vareuses oranges (bien solides), des gants de travail (qui nous embêtent et qu’on enlève) et notre masque pour se protéger les yeux.

Les ailerons des manchots leur servent à se propulser dans l’eau quand ils nagent et chassent. Ils sont très fins, plats et forts. Nous maintenons les poussins sous les ailes pour éviter qu’ils ne se déboitent l’épaule en se débattant. Le corollaire est qu’ils battent des ailerons en se débattant et frappent nos avant-bras. C’est comme si on était frappé par un instrument en bois. Un plaisir …

On a deux chaines de travail

Une fois qu’on a un manchot dans les bras (et qu’il est calme), c’est mignon, doux et ça ne sent pas mauvais comme les manchots Adélie. Nous les apportons à une équipe d’ornithos. Léo (ou Doumé) prend le manchots par le torse, pendant que nous le tenons par les pieds. Le poussin bascule sur le ventre et Léo se met dessus. Il retire le duvet entre la queue et une patte. Passe le lecture de transpondage pour vérifier que l’oiseau n’est pas encore transpondé. Il désinfecte et utilise un genre de pistolet pour injecter une puce sous la peau de l’animal (comme les phoques). Le manchot ne sent rien à cet endroit et ne bouge pas du tout. Pendant ce temps, Amandine (ou Natacha) mesure le bec de l’oiseau avec un pied à coulisse.

Manchot sur le ventre, transpondage et mesure du bec

On reprend le poussin sur les genoux. Amandine lui mesure les ailes, quand Léo lui prélève quelques plumes au niveau du torse et tâte le ventre du manchot pour savoir si son estomac est plein. Puis Léo maintient l’aile droite quand Amandine désinfecte et fait une prise de sang. Léo met le poussin dans une capuche et le transporte jusqu’à une potence où on pèse l’animal. On marque l’oiseau au ventre et sur le bout des ailes avec de la peinture verte. Et on le libère. Pendant ce temps, Amandine a désinfecté tous les ustensiles et préparé le transpondeur.

Un de nous (néophytes) écrit dans un carnet l’heure, les mesures (bec, ailes, poids), les numéros de transpondeur, la prise de sang et/ou de plumes, le stade de mue et si le poussin a de la nourriture dans l’estomac. Un autre se repose en veillant à ce que les poussins du parc ne se fassent pas la malle.

On a fait deux parcs. Un contenait de petits poussins gentils. Un autre des adolescents prêts à partir en mer et qui voulaient en découdre. On s’est occupé de 33 poussins en une après-midi. Je comprends pourquoi les ornithologues sont fatigués. J’ai moi-même des bleus sur les bras. Comme toujours avec l’agence de voyage de DDU Biomar Tourisme, dirigée par les ornithologues du bâtiment Biomar de la Dumont d’Urville, on est allé le plus loin de la base qu’on pouvait (1 km) et on avait du gâteau et du chocolat chaud pour le 4h.

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Rescue, pompiers et medics

Il y a un médecin à DDU. Mais ce n’est pas suffisant.

En bonne santé

On est bien en forme pour aller en Antarctique. Nous avons passé des tests physiques et psychologiques. En théorie, il n’y a personne d’allergique sur la base. Mais comme les hivernants vivent un an dans des conditions de vie bien différentes de celles de la métropole, il faut être suivi. Et personne n’est à l’abri d’un accident.

Hôpital et Medics

Durant mon hivernage, il y a eu des accidents, des blessures bêtes (parce qu’il n’y a pas de façon intelligente de se faire mal), de l’usure ou des carences. Sophie (la médecin) classait les hivernants entre « ceux qui ont mal au dos et ceux qui ont mal au genou ». Moi, j’avais mal au dos.

Oui, il y a un hôpital à DDU. Un bloc opératoire rudimentaire, un cabinet dentaire, une salle d’examen, une pharmacie et un bureau dans le bâtiment 42. La médecin a été urgentiste de l’hôpital public en France. Elle a reçu des formations supplémentaires en secourisme, en dentaire, etc. Mais elle ne peut pas tout faire toute seule.

D’abord, elle n’est pas isolée de la métropole. En cas de doute, elle peut demander des conseils à ses collègues des TAAFs. Et puis, il y a la télémédecine… Ca, c’est un runing gag : tous les ans, les tests de connexion échouent. Quoi qu’il en soit, on n’opère pas tout seul. C’est pourquoi Sophie a formé des hivernants pour la seconder. Ce sont les « médics ». Mais il faut aussi des personnes formées au secourisme pour extraire et transporter des personnes potentiellement blessées jusqu’à l’hôpital, et des pompiers pour extraire des personnes de potentiels bâtiments en flammes.

Secourisme

Moi, j’étais secouriste, « rescue ». J’avais jusqu’à présent une formation de SST (Sauveteur, Secouriste du Travail) et une formation de travail en hauteur pour me sécuriser moi-même en altitude. Mais « rescue », c’est encore un autre niveau de complexité.

Extraction au Mont Rose : Natacha (ornithologue) et moi en train d’extraire un campagnard (dans la barquette) suivant les indications de Sophie (médecin) et Florent (lidariste)

On s’est beaucoup formé à faire des attelages pour extraire les gens sans (trop) se fatiguer et la méthode A B C D E pour dresser rapidement un bilan général de la situation (à transmettre au médecin) et d’identifier les points problématiques à traiter en priorité.

Pompiers

La base historique de Port Martin a brûlé en 1952. Les survivants se sont installés à DDU. On a très peur du feu à Dumont d’Urville. Sur la base, les bâtiments sont éloignés les uns des autres pour éviter une propagation du feu, alors que d’autres pays ont fabriqué des bases compacts pour éviter la déperdition énergétique (par exemple Neumayer).

Nous sommes tous formés à la manipulation d’un extincteur et six personnes sont formées à entrer dans un bâtiment en flamme et extraire quelqu’un. Moi, j’ai fais partie des gens qui les aidés à s’habiller.

Lise dans son habit de pompier (sans les bottes).

J’ai participé durant tout l’hivernage aux exercices et formations. Une fois tous les 15 jours, nous avions une formation « rescue » avec Sophie et une fois par mois, nous avions un exercice incendie avec Ugo. C’était un gros engagement pour certains. Il faut toujours un « médic » et des pompiers sur la base. Donc, les pompiers d’astreinte ne pouvaient pas sortir de la base pour partir en manip ou aller se promener comme ils l’entendaient.

Pour ma part, j’ai beaucoup aimé ces formations et exercices. Elles peuvent toujours servir.

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Jeudis de la connaissance

Dumont d’Urville est une base scientifique. Durant la campagne d’été (de novembre à février), une grande partie des personnels sur place sont des scientifiques qui ont quelques mois pour mettre en place leurs expériences. En hiver, les hivernants « sciences » mettent en place les protocoles de suivi sur le long terme de plusieurs programmes. Les personnels techniques font face aux contraintes de l’Antarctique et ont aussi des choses à partager.

Bref, le jeudi soir, après le repas et à la fin du service base, quelqu’un de la base nous présente son travail ou ses hobbies. Cet été, Isabel Charrier nous a déjà parlé de son travail, et on nous promet déjà de parler de manchots et de sciences atmosphériques. Il y a des jeudis de la connaissance pendant l’hiver également. Il faut bien admettre qu’à 24, c’est plus convivial qu’à 80.

Les sujets dépendent des hivernants : de la photo argentique au transpondage des phoques, du cancer de la peau à la préparation d’une sauce.

J’ai moi-même fait deux présentations : une pendant la campagne d’été sur la météo à DDU.

Et puis au cours de l’hiver et au gré des conversations de l’hivernage, j’ai décidé de parler de bande dessinée :

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Les phoques (seconde partie)

Depuis le retour des phoques, je suis de sortie toutes les semaines. Si je ne suis pas celle qui sors le plus dans l’équipe, je fais partie des amateurs un peu mieux formés.

Sondage à Débarquement

La première étape, c’est de définir un périmètre sécurisé sur la banquise dans lequel partir à la recherche des phoques. Les ornithologues aussi étaient impatients de sortir explorer les environs, mais pour cela, il fallait attendre des sondages de la banquise jusqu’à Débarquement à 8 km (et à Hélène à 12km). Avec le dista (chef de la station), Natacha et Florent, nous sommes partis dans l’après-midi du 6 novembre. L’aller-retour a été sportif mais un succès. Le périmètre autorisé est immense. Nous ne pourrions pas aller plus loin en une journée de marche.

Les sorties « phoques »

Cette année, ils étaient deux à devoir sortir à la recherche de phoques : Natacha pour les transpondages et Simon pour les enregistrements audios. Donc ils étaient deux à avoir besoin de personnes pour les accompagner (plus on va loin, plus on doit être nombreux pour des raisons de sécurité) et pour les aider. Les pauvres avaient du mal à recruter, mais nous avions toujours la possibilité de sortir avec eux.

Natacha et les transpondages

Natacha est une force de la nature. Elle tire sur des kilomètres une pulka surchargée. Elle se lave les mains nues dans la neige par grand vent. Et elle peut repartir le lendemain.

Lors d’une sortie « phoques », on fait le tour de toutes les îles et de tous les icebergs possibles, et Natacha scrute la banquise avec ses jumelles. En elle-même, la balade par beau temps entre les icebergs vaut la peine. Mais là, on cherche les phoques…

Natacha et ses jumelles

J’ai aidé à transponder le premier pup (bébé phoque) de l’année lors d’une sortie avec Natacha, Lise et Aubin, par un vent à décorner les bœufs. Nous avions du mal à avancer et surtout nous ressentions d’autant plus le froid. Il y avait quelques femelles gestantes de-ci de-là qu’on se doit de laisser tranquille. Et puis, au niveau de Derby, on a vu une femelle et son pup.

Un transpondage ?

Il s’agit de placer sous la peau des phoques (pups et femelles principalement) une puce RFID qui les identifie. Pour cela, on vole momentanément le pup à sa mère. Une personne distrait la femelle, pendant que Natacha et possiblement une seconde personne tire le pup à quelques dizaines de mètres. Les phoques mordent, donc Natacha leur met une capuche sur la tête. Une personne monte sur le pup sans mettre de poids sur l’animal, juste pour l’immobiliser et vérifie qu’il respire bien.

Imaginez que vous êtes cette personne. Vous avez enlevé vos crampons pour ne pas blesser l’animal. Vous portez de gros gants parce qu’il mord même à travers la capuche (si, si, ça m’est arrivé). Vous êtes à genou au-dessus du pup. Vous vous assurez que les nageoires restent dans la capuche. De temps en temps, il bouge et vous augmentez la pression. Derrière vous, Natacha désinfecte le dos de l’animal, pas très loin de la queue. Elle vous prévient quand elle pose le désinfectant et quand elle pique parce que le pup s’agite à ces moments. Elle pique à l’aide d’une sorte de pistolet. L’aiguille fait de l’ordre d’un millimètre. De temps en temps, le pup bouge beaucoup et il saigne. Dans ce cas, elle prend de la glace autour d’elle et fait un point de compression. Puis elle vous tend le bout d’un mètre ruban que vous placez à la hauteur du nez de l’animal et vous dit la longueur (de l’ordre de 1,20).

Ensuite, vous vous levez et vous poussez le pup sur un filet, ni trop vers l’avant ni trop vers l’arrière. Le filet sert à soulever l’animal pour le peser. Natacha et vous soulevez l’animal (entre 25 et 50 kg) à l’aide d’une barre que vous placez sur votre épaule. On repose le phoque qui n’a pas cessé de gigoter pendant toute l’opération. On lui enlève la capuche et on le remet à côté de sa mère.

Pendant toute l’opération, la femelle a cherché son petit qui périodiquement crie à l’aide. Les comportements des mères sont très variables, de la fuite à la grande agressivité. Mais un de vous doit toujours la distraire, l’empêcher d’arriver là où vous travaillez ou d’aller piquer le petit d’un autre phoque qui se trouverait par hasard à quelques dizaine de mètres. A l’aide de la capuche pour adulte, votre collègue lui cache la vue des opérations. Pour une raison qui m’échappe les phoques ne nous attaquent pas. Ils sont pourtant beaucoup plus gros que nous (450 kg). Le pire est la morsure, qui n’a pas eu lieu cette année. Une fois qu’on s’est assuré que la mère et le petit se reconnaissent et interagissent ensemble. On note les mesures du pup et son numéro de transpondeur. Natacha désinfecte ses affaires et prépare d’autres aiguilles. Vous nettoyez dans la neige le reste du matériel de toutes les déjections que le pup a pu y déposer.

Les sorties se sont enchainées, vers Débarquement et aussi vers Hélène. Je fais partie des happy-fews qui ont pu aller à Hélène. J’ai fais une dernière sortie avec Coline, la coordinatrice science de l’IPEV en début de campagne d’été. Les petits partaient déjà à l’eau. Et puis début novembre, la banquise a débâclé.

Les audios de Simon et Isabelle

Isabelle Charier est chercheuse au CNRS. Elle étudie les communications mère-jeune. Est-ce qu’ils sont capables de se reconnaitre et surtout à quel moment à partir de la naissance cette reconnaissance se met-elle en place ? Pour cela, elle et Simon enregistrent les cris de contact entre les pups et leurs mères. Ils suivent une quinzaine d’individu de Bernard à Pasteur.

Vidéo de Simon

Ils vont placer une enceinte à côté de la mère à l’opposé du pup et vont émettre une série de cris, de son petit mais aussi d’autres petits du même âge. Ils filment la scène pour savoir si la femelle a une réponse comportementale différente aux cris de son jeune, vis-à vis d’un jeune étranger. Et ils font la même expérience avec les pups en diffusant des cris de mères. Isabelle fait cette expérience juste après la naissance (quand c’est possible), ou alors une semaine après la naissance, puis à 2 puis à 3 semaines. A chaque fois, le pup grossit donc sa voix change. Elle calcule les temps de latence entre les réactions et les premières diffusions. Est-ce que la mère s’approche du micro ou est-ce qu’elle va renifler son petit ou vérifier s’il est bien à coté d’elle. Il faut attendre le bon moment pour diffuser les cris. Il ne faut pas que les phoques soient trop vocaux ou agités (on ne différencie pas à quoi ils réagissent), ni trop endormis (sans quoi ils ne réagissent pas).

Les premiers résultats indiquent qu’il y a peu de réponses des petits, sauf quand ils sont tout seuls. Sans doute ont-ils une plus grande motivation à retrouver leur mère et les soins maternels à ce moment-là. Les femelles, quant-à elles, réagissent aux cris de leur pups quand ils ont entre 1 et 2 semaines.

Simon observe les phoques (photo : Romain)

Une dernière sortie phoques avec Simon

Le 20 novembre, c’est la débâcle de la banquise depuis quelques jours. Nous ne savons pas si l’accès jusqu’à Pasteur (à 5 km) sera possible ou non, car cette île est cachée par le glacier. La décision tombe le matin après un vol de reconnaissance de l’hélicoptère. C’est bon, nous avons l’autorisation de partir.

Nous sommes partis à trois (Simon, Antoine le nouveau responsable technique et moi). L’équipement de Simon était trop lourd. J’ai pris une deuxième pulka. Après quelques kilomètres, la mer n’est plus qu’à une dizaine de mètres. Arrivée à Pasteur, nous nous avons fait une première expérience. Le long d’une rivière, pas très loin de quelques phoques allongés sur la banquise. On élargit la faille à la scie de façon à avoir un beau trou.

La scie à glace très efficace

Simon met à l’eau : un haut-parleur qui restitue les chants des phoques, une webcam qui filme l’arrivée potentielle des animaux et un microphone qui enregistre l’expérience. On amarre solidement le tout dans la glace. Et on attend 10 min. Puis on lance les sons : 5 fois 5 phrases différentes. Puis on attend à nouveau10 min. Bref, on a eu le temps de manger notre sandwich durant la manip’. Mais à la troisième phrase, un phoque a sortie la tête de l’eau. Il a sorti les narines de l’eau une dizaine de fois, à chaque inspiration. Simon a déjà fait l’expérience de la réaction violente d’un phoque à cette phrase. Pour lui, elle veut dire quelque chose. Nous sommes sceptiques. Et si c’était jusque le temps que le phoque curieux arrive ? Un hasard que ce soit à cette phrase.

Simon et son matériel
Microphone
Enceinte sous marine
L’eau est très sombre par comparaison avec la glace, mais elle est très claire parce qu’on voit l’enceinte à 5m de profondeur.

Nous sommes ensuite allés à Derby. Simon a changé l’ordre des pistes. Une fois de plus un phoque apparaît. Il est plus prudent que le premier. Il nous a vu à travers le trou d’eau. Il faut dire que nous étions bien plus attentif et proche du trou lors de cette deuxième expérience. Le phoque a pris peur. Il est allés respirer quelques mètres plus loin.

Enfin, nous sommes arrivés à Florence. Là, nous sommes tombés sur un trou de 80cm de diamètre dans la banquise. Nous avons bien évacué la glace flottante et envoyé uniquement la phrase en question. Un immense phoque est arrivé. On a pu le voir nager sous l’eau, c’était magnifique. Une deuxième phrase quasi identique a produit le même effet. Puis on a envoyé une musique quelconque et aucun phoque n’est apparu. Simon était aux anges.

J’ai sans doute assisté à une grande découverte scientifique : la musique qui appelle les phoques.

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Écoles

Quand j’ai commencé à parler d’Antarctique, Virginie a été une des premières à s’enthousiasmer pour mon projet. Virginie est institutrice à l’école primaire de La Fouillade, un village voisin de Najac où j’habite. C’est donc tout naturellement que nous avons convenu de quelques interventions auprès des élèves de son école. Puis j’en ai parlé avec le conseiller en charge de la culture à Najac. Il m’a mis en contact avec Bélinda, la directrice de l’école primaire de Najac.

Une visite dans les écoles : à la rencontre des élèves

J’ai rencontré les élèves dans leur école en novembre 2023.

Des appels tous les mois

Avec le recul, je pense que c’était important que les enfants me voient en chair et en os avant mon départ, avant qu’on discute par visioconférence, comme nous le faisions tous les mois jusqu’aux grandes vacances.

Et ça a été une super expérience. J’envoyais tous les mois quelques photos. Ça me permettait de faire le point sur ce qui s’était passé à Dumont D’Urville. Les institutrices les montraient aux élèves. Elles m’envoyaient leurs questions. Puis, lors des visios, les élèves s’adressaient directement à moi.

Bref, l’année s’est très bien passée de mon point de vue. Et en juin, les élèves de La Fouillade m’ont dit au revoir avec de petits exposés et des dessins de remerciement. Puis, ils sont partis en vacances.

Une nouvelle classe

A la rentrée, c’est une nouvelle classe (avec quelques anciens) qui s’est présentée à moi. Ils étaient aussi enthousiastes à la vue du paysage de banquise que l’année précédente. Ils avaient toujours des questions mignonnes et intéressantes. On va encore faire une dernière visio avant que je ne reprenne le bateau pour Hobart. Et, qui sait, je passerai sûrement les voir en mars en France.

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Activités physiques d’extérieur

Nous avons eu un temps magnifique une bonne partie de l’année. Il fallait en profiter.

Les jeux à l’extérieur

D’abord, il y a les petites sorties, comme faire de la luge ou de la pétanque.

Luge sur le mont Rostand (vidéo de Simon)

Cette année, la banquise est particulièrement praticable. Elle s’est formée en mars et n’a pas débaclé depuis. On a donc peu de zones de chaos. La glace est ainsi restée parfaitement horizontale et solide pendant tout l’hivernage. Ça offre des possibilités.

J’ai eu l’opportunité de faire du patin à glace sur la banquise. Il y a des pantins à glace sur la base. La banquise n’est pas parfaitement plane. Le vent forme de petites vagues de neige de quelques millimètres (sastrugi) qui ensuite se transforment en glace en gardant la même forme. On ne va donc jamais très vite ou très loin en patins à glace. Mais l’étendue de « glace bleue » sur laquelle glisser était très vaste.

J’ai aussi fait du vélo tant que je pouvais.

Glace bleue (un peu trop proche de l’ile… pas sûr qu’elle soit très épaisse)

Et puis de temps en temps, il neige. On a eu peu de neige cette année. Mais certains ont fait du ski. La neige est très poudreuse. Juste après être tombée, elle ne porte pas du tout. On nage dedans. Ne serait-ce que quand elle fait 50cm d’épaisseur, ça devient dur de se déplacer, voire dangereux car on ne voit plus les failles. Après quelques jours, elle est parfaitement dure et nous porte sans problème. Je n’ai pas trouvé le moment où les raquettes sont un atout vraiment utile.

Art de la randonnée à DDU

On ne va pas très loin sur la banquise. Au maximum le périmètre autorisé va jusqu’à Hélène (12,5 km) et Débarquement (7 km). Ce n’est pas très loin, mais on marche dans la neige ou sur des monticules de neige. C’est long et fatiguant, même pour de toute petites sorties.

Savoir se couvrir, mais pas trop

C’est un problème partout dans le monde. Quand on marche on a trop chaud et quand on s’arrête, on a froid. Ce qui change à DDU, c’est la gestion de l’humidité. Quand on marche, on transpire et puis quand on est mouillé, on a froid, même quand on marche.

Il y a la transpiration, il y a aussi la respiration. On se protège le visage du vent par des tours de cou et des cagoules. La respiration condense instantanément sur les tissus, qui prennent l’aspect du carton et on sent le contact de la glace sur son visage. Parfois la vapeur d’eau remonte le long du visage et condense sur les cils.

Juliette avec son tour de cou en carton, ses cils et ses cheveux gelés

Je prends toujours plusieurs tours de cou et cagoules avec moi, que je change régulièrement au fur et à mesure de la balade.

Ne pas trop porter

Natacha et sa pulka (Elle scrute l’horizon à la recherche de phoques)

Le minimum, c’est un sac banquise. Imaginons qu’on tombe dans un trou sur la banquise, c’est alors très dur de se faire secourir avant l’hypothermie. On emmène donc avec soi une corde flottante, des affaires de rechange, des affaires étanches, des chaufferettes, à manger et une thermos. C’est le minimum et tout de suite lourd et encombrant.

Si en plus de cela, on part en mission. Il faut ajouter le matériel soit de transpondage, soit d’acoustique, de sondage, etc. C’est un luxe de se balader avec des pulkas.

Préserver sa nourriture

Qui n’a pas mangé son sandwich congelé sur la banquise ? Un sandwich, ça se mange froid et ça ne contient pas d’eau : quel besoin y a t-il de le maintenir au chaud ? C’est une erreur de débutant. Après quelques heures sur la banquise toute nourriture semble avoir été passée au congélateur. C’est très désagréable à manger. On met des bouillottes dans les sacs isothermes qui contiennent les repas.

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Activités physiques d’intérieur

Je ne suis pas très sportive. Mais en métropole, je fais du vélo quasi-quotidiennement : je vais au travail et je me promène à vélo. Je randonne quelques fois par an. Rien de trop violent.

A Dumont d’Urville, on est très statique. On mange bien. On s’empâte. On se démuscle. Quelque part, il faut trouver le moyen de bouger.

Salle de sport

J’avais pris la décision de faire du vélo d’appartement plusieurs fois par semaine. En campagne d’été tout allait très vite. Je n’ai eu le temps d’aller à la salle de sport qu’après quelques mois. Elle se trouve dans un bâtiment technique (le 75) entre les réserves médicales et le stockage des déchets.

La salle de sport

La première fois, j’ai eu du mal à m’y mettre. Pour moi, le vélo d’appartement, c’est pas du vélo ! En tout cas, c’est les pires conditions de vélo : t’as pas le paysage, pas la vitesse ou le vent dans les cheveux. Tu n’as même pas le coté pratique du transport d’un point à un autre et pas non plus la satisfaction d’avoir monté un col. Par contre, tu as tous les inconvénients : l’odeur de ta sueur, l’exercice physique et le mal au fesse. Et puis, aller à la salle de sport, je pensais que c’était un truc de m’as-tu-vu.

Mais bon, je manquais tellement d’exercice qu’après 20min, j’étais réconciliée avec la machine : juste un peu en sueur, mais pas trop fatiguée. C’est un peu ce que je demande à l’appareil. Il est d’utilisation facile. Tu te mets dessus. Tu pédales. Tu as des indications… En particulier le temps.

La salle de sport n’est pas mon endroit préféré, mais c’est bien pratique, en particulier après plusieurs jours de vent.

Ce qui se fait sur la base

Mon utilisation de la salle de sport est très limitée : un peu de vélo, un peu de rameur… Mais comme la salle de sport est aussi une salle de musculation, certains suivent des programmes de renforcement musculaire. Il y a eu des séance de yoga et de pilate, et puis de nombreuses épreuves des Jeux Australiques.

Jeux Australiques

J’en ai déjà parlé dans l’article sur la nuit polaire. Il s’agit d’une compétition sportive entre les trois districts austraux (Crozet, Kerguelen, Saint Paul et Amsterdam), la base franco-italienne de Concordia, et celle Dumont d’Urville.

Les épreuves sont très nombreuses et il y en a pour tous les goûts : du crossfit à l’essuyage de vaisselle, du dessin à la chorégraphie. Toute la base a participé.

Lise pendant les Jeux Australiques
Essuyage de vaisselle des jeux australiques

Les activités d’intérieur, il n’y en a pas tant que ça. Les activités d’extérieur sont plus intéressantes.

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Mes productions

En antarctique, on y vit, on y travaille aussi.

La veille

DDU est une station d’observation météorologique et de prévision. On y produit 2 bulletins par jours : un météogramme le matin et un bulletin le soir. La journée de veille, je la décris dans un podcast que vous pouvez écouter ici.

La veille, c’est beaucoup de temps, mais pas beaucoup de production. Le travail, c’est de s’adapter aux besoins.

État de la mer

Sur la base, la prévision météorologique, ce n’est pas du tout comme en métropole : on l’écrit sur place pour les gens sur place qu’on voit tous les jours.

La première demande que j’ai eu était de modifier la prévisions de houle… Je faisais déjà un suivi de la glace de mer. Pour cela, je surveillais la houle, qui a le mauvais goût de faire débacler la banquise par image satellite.

Extraction d’images satellite de la base pour le suivi de la banquise

Mais en été, quand il n’y a plus de glace, Célestin qui conduit une petite embarcation souhaitait que je lui fournisse la hauteur des vague dans Pointe Géodésie. J’ai adapté aux observations de Célestin une formule empirique de la hauteur des vagues comme celle-ci :

H_f=\frac{\lambda_5 u^2}{g}
  • où, H_f – hauteur des vagues complètement formées
  • \lambda_5 – coefficient sans dimension environ égal à 0,27
  • u – vitesse du vent
  • g – accélération de la pesanteur.

A cette occasion, j’ai pu faire un tour de bateau.

Animation et Météo Participative

La météo, c’est un sujet qui intéresse. Donc c’est agréable à vulgariser. C’est ce que j’ai fait lors d’un jeudi de la connaissance. J’ai fait lancer le ballon de radiosondage à des dizaines de personnes, mais aussi j’ai fait écrire des bulletins de prévision et énoncer le bulletin radiophonique.

Pour avoir plus d’interactions avec les utilisateurs et pour récupérer des informations d’observations, j’ai codé un outil de météorologie participative (php et javascript) durant la campagne d’été 2023-2024. Tous les hivernants peuvent maintenant remplir un formulaire d’observations sur l’intranet de la base (accessible sur les téléphones portables). Ils peuvent joindre une photo, un commentaire ou une question. Les observations et photos arrivent par mail de la station météo de DDU.

Fourniture de données

Il n’y a pas une activité de la base qui ne soit pas météo-sensible. Alors les données météos sont très prisées.

A DDU, nous récoltons des données de températures, humidités, vent, rayonnement et temps sensible (visibilité, précipitations) dans une base de données locale. Puis, une partie de ces données est envoyée aux bases de données météorologiques en métropole.

Nous n’avions pas sur place d’outil simple de visualisation de ces données. En recherchant dans les archives de la station, on se rend compte que c’est un handicap que les agents successifs ont voulu résoudre en réinventant la roue à chaque génération.

J’ai utilisé les scripts Python des missions précédentes que adapté et j’ai mis en forme dans un logiciel de visualisation avec FreeSimpleGUI. D’abord les données minutes puis les données horaires. C’est VisuDDU.

De la même manière, les données climatologiques sont standart depuis 3 ans sur DDU. Il y a les données de climatologie ( les moyennes 1991-2020). Les comparaisons ce chaque mois à la climatologie. Puis la fabrication des graphiques servant aux rapports climatologiques mensuels et des comparaisons entre années sur une certaine période. C’est ClimDDU.

Remplissage automatique

A la station, nous avons un suivi au jour le jour de certains indicateurs. Au début de ma mission, nous inscrivions à la main des champs quotidiens tels que les températures minimales et maximales, les périodes et amplitude de la houle, le vent max … dans différents fichiers. De la même façon, nous inscrivions des valeurs du radiosondage dans un fichier dédié. Au total, c’était une cinquantaine de valeur que nous rentrions à la main, faisant passer ces chiffres d’un ordinateur (avec les bases de données) à un autre (avec les feuilles libreoffice). Stupide !

J’ai écris des programmes Python de remplissages de ces champs depuis les messages envoyés automatiquement vers les fichiers libreoffice.

J’ai mis ces codes sur le GitLab de Météo France, pour qu’on évite de les perdre.

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HISTOIRE PAS ENCORE TRADUIT

Mes podcasts

En France, j’écoute beaucoup de radios et de podcasts. A Dumont D’Urville, c’est impossible d’avoir la radio : les ondes hertziennes ne nous atteignent pas, et les sites de streaming – dont Radio France – sont interdits pour préserver la bande passante de la station. Quand, au cours de l’hivernage, on a eu accès à Starlink, la connexion est restée mauvaise et la radio inaudible.

Il reste les podcasts. J’en avais fait une énorme collection avant de partir et j’en ai trouvés plein sur place aussi. Ils sont en libre-service sur un serveur nommé Adélix, tout comme les films, la musique, les répertoires personnels. Je ne suis pas la seule à en écouter beaucoup.

On les écoute au travail, dans sa chambre, à la salle de sport, en balade. Les espaces privés, la chambre ou la salle de bain sont petits et doivent rester relativement silencieux, donc le casque est obligatoire. Certains ont les écouteurs sur les oreilles en permanence. Je n’ai pas d’airpods mais vu que la chambre est petite et que je travaille sur PC, je n’ai pas été limitée dans mes mouvements par la longueur du câble.

Des podcasts j’en fais aussi

Je n’ai pas de goût pour la vidéo. J’ai pris un bon appareil photo en venant à DDU, mais ce n’est pas une passion et je n’ai pas le savoir-faire. Je suis plus à l’aise avec l’audio.

Juste avant mon départ, une radio associative s’est montée dans mon village. J’ai discuté avec les responsables de l’opportunité de faire des podcasts de ma mission en Terre Adélie. On a défini le format : ce serait des cartes postales sonores. J’y parlerais à la première personne, en décrivant l’environnement, ce serait 2-3 min à chaque fois, etc. J’ai fait un stage avec l’association Media Commun (deux jours de prise de son et de montage).

Je me suis munie d’un petit Zoom H1 et j’ai commencé à enregistrer. Pendant le voyage, durant la campagne d’été 2023-2024, j’ai beaucoup enregistré et pendant l’hivernage j’ai fait encore des dizaines d’enregistrements. J’ai donc à ma disposition des pistes et des pistes de sons de DDU. Puis au début de l’hivernage, j’ai commencé à monter tout cela…

Pour vous dire la vérité, on avait discuté avec La Locale de faire des podcasts sans montage. Je n’ai jamais réussi à faire un enregistrement d’une qualité suffisante. J’ai besoin qu’il y ait un début, une histoire et une chute. Bref, j’écris tout. J’ai investi une pièce vide où je m’enregistrais et j’ai fais un brin de montage. Puis j’ai envoyé les fichiers (au bon format, avec la terrible connexion de DDU) et Gérald de la Locale a mixé les sons. Ça m’a pris des heures et des heures pour 3min d’enregistrement. J’avais prévu d’en faire 5, j’en ai fait 2.

Les voici sans le mixage de Gérald :

Dans l’astrolabe
Journée de travail (partie 1)
Journée de travail (partie 2)

Ça n’a pas le professionnalisme des podcasts du Dr Sophie Faille, ni l’exotisme des enregistrements de phoques de Simon, mais je les aime bien.